La Palestine reconnue à l’ONU : ce n’est pas un problème, mais la solution !
Jean-Claude Lefort, jeudi 29 novembre 2012
LE PLUS. Ce jeudi soir, à 20 heures, l’Assemblée générale de l’ONU décidera par un vote si elle accorde le statut d’"État observateur non membre" à la Palestine. Un moment historique pour tous ceux qui prônent une reconnaissance officielle de ce pays, à l’histoire si lourde. Parmi eux, Jean-Claude Lefort, président de l’association France Palestine Solidarité.
Édité par Hélène Decommer
Édité par Hélène Decommer
Le 29 novembre 1947, il y a 65 ans jour pour jour, l’Assemblée générale de l’ONU adoptait la résolution 181, recommandant le plan de partage de la Palestine historique en deux États, l’un qui allait devenir Israël (55% de la terre lui étant donnés), l’autre attribué aux "arabes", ainsi qu’on désignait alors les Palestiniens.
Une partition qui n’est toujours pas réalisée
L’Assemblée générale prit cette décision par 33 voix pour, 13 contre et 10 abstentions. Mais celle-ci, notons-le, fut prise sans la moindre consultation de la population "autochtone" alors présente qui, par principe, et supérieurement au mandat britannique, détenait entre ses mains, elle et elle seule, la souveraineté sur cette terre. Car contrairement à la formule de propagande indéfiniment répétée : "La Palestine [n’était] pas une terre sans peuple pour un peuple sans terre."
Le 14 mai 1948, l’État d’Israël était proclamé par Ben Gourion "au nom des droits historiques et naturels" que les Juifs, selon lui, possédaient sur cette terre. Depuis plusieurs mois s’était déjà enclenchés des combats provoquant des massacres qui allaient déboucher sur la "Nakba", la "catastrophe", entraînant le "départ" forcé de quelque 800.000 Palestiniens. Les Britanniques se retirant le même jour que cette proclamation, laissant ainsi les pays arabes voisins et Israël en guerre dans un tête-à-tête mortifère.
Le 11 mai 1949, Israël était admis comme État membre de l’Organisation des Nations unies, obligation lui étant faite de respecter la Charte, mais aussi toutes les résolutions adoptées antérieurement à son admission au sein de l’Organisation, la résolution 181 comme la 194, adoptée le 11 décembre 1948, relative au droit de retour des réfugiés palestiniens. Ces conditions étaient acceptées et actées par l’Organisation.
On sait ce qu’il advint de cette partition qui n’est toujours pas réalisée puisque seul un État a vu le jour – Israël – avec la "bénédiction" des Nations unies. Pourtant, dès 1988, la partie palestinienne décidait de proposer, de manière unilatérale, un compromis véritablement historique. Elle renonçait en effet aux frontières de 1947 et déclarait sa volonté de construire son État palestinien, avec Jérusalem-Est comme capitale, sur seulement 22% de la Palestine historique au lieu des 44% initiaux.
La colonisation, une entorse au droit international
Et depuis tout ce temps et malgré tout cela, où est cet État palestinien ? Nulle part… On parle des "Territoires palestiniens occupés" et Israël récuse même le terme, ne les considérant que comme des "terres disputées". En somme, pour Israël, adepte du fait accompli, "ce qui est à moi est à moi et ce qui est à toi est négociable" ! Jérusalem Est, sans laquelle il ne peut y avoir d’État palestinien, a été "annexée", en violation totale du droit international. Israël considérant la ville "trois fois sainte" comme "sa capitale éternelle et réunifiée".
Les "Accords d’Oslo", les "Feuilles de route" et autre Quartette n’y ont rien fait, tout au contraire : jamais l’occupation israélienne n’a atteint une telle ampleur. Les Territoires palestiniens sont aujourd’hui une somme de petits îlots, de Gaza à Djénine, sans liens entre eux ni souveraineté terrestre, maritime ou aérienne.
Dans ces conditions, parler de poursuivre les "négociations" sans poser comme point de départ absolu les exigences du droit international constitue, en fait, une prime encourageant Israël à poursuivre sa colonisation totale de la terre palestinienne. Contre le droit et la justice. Et donc aussi contre la paix.
Devant ces impasses cruelles, il fallait donc que l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), qui représente l’ensemble du peuple palestinien (qu’il réside ou non en Palestine), mette enfin les Nations unies devant leurs responsabilités.
La Palestine à l’ONU, un pas capital vers la justice et le droit
Cela fut demandé sans être possible en septembre 2011, du fait de la menace de veto brandie par les États-Unis (bien seuls sur ce sujet). Ce 29 novembre 2012, l’OLP va donc demander à l’Assemblée générale de l’ONU, compétente et statuant à la majorité simple (sans veto possible), d’accueillir l’État de Palestine au sein de l’Organisation comme "État non-membre", c’est-à-dire comme un État disposant de tous les attributs d’un État membre, sauf le droit de vote. Cela n’empêchant pas les Palestiniens de demander à tout moment le statut d’État membre de plein droit.
Cela met les dirigeants israéliens absolument hors d’eux, car ils sont devant ce qu’ils refusent depuis toujours : l’application du droit international. D’aucuns, en Israël, ont même menacé, ni plus ni moins, le président de l’OLP de liquidation physique s’il persistait…
Quelles seront les conséquences de ce vote qui est acquis et pour lequel la France – nous nous en réjouissons pour avoir agi en ce sens depuis des mois avec d’autres – s’est enfin prononcée positivement ?
Sur le terrain cela ne changera pas la vie des Palestiniens : pas un soldat de moins, pas un check-point de moins, pas un morceau du Mur de moins, pas de levée du blocus à Gaza, etc. Et pourtant, au plan politique, cela constituera un pas en avant important redouté par Netanyahu : le droit sera affirmé et voté clairement. Le cadre des discussions sera posé, un cadre jusqu’ici farouchement refusé par les dirigeants israéliens. Désormais il sera dit qu’un État des Nations Unies en occupe un autre. Il reviendra à l’ONU d’en tirer les conséquences.
Un vent d’espoir sur cette région
Les dirigeants israéliens indiquent, à s’étouffer, que cette perspective de l’admission de la Palestine à l’ONU constituera un "tsunami" politique. Pour ce qui nous concerne, nous y voyons au contraire un vent d’espoir qui commencera à souffler sur cette région du monde, une région en pleine mutation et si sensible. Il faudra bien d’autres efforts pour aboutir à la paix. Beaucoup d’autres. C’est certain et il faut le dire.
Mais que les dirigeants israéliens y songent bien, eux qui poursuivent une politique suicidaire pour le peuple israélien : seuls, en fait, les Palestiniens sont en situation de leur accorder, par l’existence de leur État, une incontestable légitimité internationale, une légitimité reconnue par tous, à commencer par leurs voisins arabes.
La création d’un État palestinien souverain dans les frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale, n’est pas le problème. C’est la solution. Pour tous !
Une partition qui n’est toujours pas réalisée
L’Assemblée générale prit cette décision par 33 voix pour, 13 contre et 10 abstentions. Mais celle-ci, notons-le, fut prise sans la moindre consultation de la population "autochtone" alors présente qui, par principe, et supérieurement au mandat britannique, détenait entre ses mains, elle et elle seule, la souveraineté sur cette terre. Car contrairement à la formule de propagande indéfiniment répétée : "La Palestine [n’était] pas une terre sans peuple pour un peuple sans terre."
Le 14 mai 1948, l’État d’Israël était proclamé par Ben Gourion "au nom des droits historiques et naturels" que les Juifs, selon lui, possédaient sur cette terre. Depuis plusieurs mois s’était déjà enclenchés des combats provoquant des massacres qui allaient déboucher sur la "Nakba", la "catastrophe", entraînant le "départ" forcé de quelque 800.000 Palestiniens. Les Britanniques se retirant le même jour que cette proclamation, laissant ainsi les pays arabes voisins et Israël en guerre dans un tête-à-tête mortifère.
Le 11 mai 1949, Israël était admis comme État membre de l’Organisation des Nations unies, obligation lui étant faite de respecter la Charte, mais aussi toutes les résolutions adoptées antérieurement à son admission au sein de l’Organisation, la résolution 181 comme la 194, adoptée le 11 décembre 1948, relative au droit de retour des réfugiés palestiniens. Ces conditions étaient acceptées et actées par l’Organisation.
On sait ce qu’il advint de cette partition qui n’est toujours pas réalisée puisque seul un État a vu le jour – Israël – avec la "bénédiction" des Nations unies. Pourtant, dès 1988, la partie palestinienne décidait de proposer, de manière unilatérale, un compromis véritablement historique. Elle renonçait en effet aux frontières de 1947 et déclarait sa volonté de construire son État palestinien, avec Jérusalem-Est comme capitale, sur seulement 22% de la Palestine historique au lieu des 44% initiaux.
La colonisation, une entorse au droit international
Et depuis tout ce temps et malgré tout cela, où est cet État palestinien ? Nulle part… On parle des "Territoires palestiniens occupés" et Israël récuse même le terme, ne les considérant que comme des "terres disputées". En somme, pour Israël, adepte du fait accompli, "ce qui est à moi est à moi et ce qui est à toi est négociable" ! Jérusalem Est, sans laquelle il ne peut y avoir d’État palestinien, a été "annexée", en violation totale du droit international. Israël considérant la ville "trois fois sainte" comme "sa capitale éternelle et réunifiée".
Les "Accords d’Oslo", les "Feuilles de route" et autre Quartette n’y ont rien fait, tout au contraire : jamais l’occupation israélienne n’a atteint une telle ampleur. Les Territoires palestiniens sont aujourd’hui une somme de petits îlots, de Gaza à Djénine, sans liens entre eux ni souveraineté terrestre, maritime ou aérienne.
Dans ces conditions, parler de poursuivre les "négociations" sans poser comme point de départ absolu les exigences du droit international constitue, en fait, une prime encourageant Israël à poursuivre sa colonisation totale de la terre palestinienne. Contre le droit et la justice. Et donc aussi contre la paix.
Devant ces impasses cruelles, il fallait donc que l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), qui représente l’ensemble du peuple palestinien (qu’il réside ou non en Palestine), mette enfin les Nations unies devant leurs responsabilités.
La Palestine à l’ONU, un pas capital vers la justice et le droit
Cela fut demandé sans être possible en septembre 2011, du fait de la menace de veto brandie par les États-Unis (bien seuls sur ce sujet). Ce 29 novembre 2012, l’OLP va donc demander à l’Assemblée générale de l’ONU, compétente et statuant à la majorité simple (sans veto possible), d’accueillir l’État de Palestine au sein de l’Organisation comme "État non-membre", c’est-à-dire comme un État disposant de tous les attributs d’un État membre, sauf le droit de vote. Cela n’empêchant pas les Palestiniens de demander à tout moment le statut d’État membre de plein droit.
Cela met les dirigeants israéliens absolument hors d’eux, car ils sont devant ce qu’ils refusent depuis toujours : l’application du droit international. D’aucuns, en Israël, ont même menacé, ni plus ni moins, le président de l’OLP de liquidation physique s’il persistait…
Quelles seront les conséquences de ce vote qui est acquis et pour lequel la France – nous nous en réjouissons pour avoir agi en ce sens depuis des mois avec d’autres – s’est enfin prononcée positivement ?
Sur le terrain cela ne changera pas la vie des Palestiniens : pas un soldat de moins, pas un check-point de moins, pas un morceau du Mur de moins, pas de levée du blocus à Gaza, etc. Et pourtant, au plan politique, cela constituera un pas en avant important redouté par Netanyahu : le droit sera affirmé et voté clairement. Le cadre des discussions sera posé, un cadre jusqu’ici farouchement refusé par les dirigeants israéliens. Désormais il sera dit qu’un État des Nations Unies en occupe un autre. Il reviendra à l’ONU d’en tirer les conséquences.
Un vent d’espoir sur cette région
Les dirigeants israéliens indiquent, à s’étouffer, que cette perspective de l’admission de la Palestine à l’ONU constituera un "tsunami" politique. Pour ce qui nous concerne, nous y voyons au contraire un vent d’espoir qui commencera à souffler sur cette région du monde, une région en pleine mutation et si sensible. Il faudra bien d’autres efforts pour aboutir à la paix. Beaucoup d’autres. C’est certain et il faut le dire.
Mais que les dirigeants israéliens y songent bien, eux qui poursuivent une politique suicidaire pour le peuple israélien : seuls, en fait, les Palestiniens sont en situation de leur accorder, par l’existence de leur État, une incontestable légitimité internationale, une légitimité reconnue par tous, à commencer par leurs voisins arabes.
La création d’un État palestinien souverain dans les frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale, n’est pas le problème. C’est la solution. Pour tous !
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